Un peu d’histoire
Le lieu-dit « le Moulin Journet » est un « écart » par rapport au Bourg de Chevagny, situé à l’Ouest, au pied de la barre rocheuse sur laquelle le Bourg a été construit (voir la carte insérée dans ce Bulletin). On y voit une ligne bleue d’orientation Nord-Sud : c’est le Ruisseau du Moulin Journet, qui prend sa source au Nord de Chevagny, en contrebas de la route de Verzé et se jette dans la Petite Grosne juste avant le Moulin de Verneuil. Un chemin le longe, du hangar agricole jusqu’à Montagny : on y voit des promeneurs à pied, à cheval ou en vélo, et on y entend le bruit du ruisseau.
A l’emplacement de l’ancienne limite du Moulin, le ruisseau fait un coude et quitte le chemin : il s’agit d’un détournement de son cours ancien, effectué entre 1831 et 1865 (il faudrait chercher davantage pour préciser la date). Peu après se trouvent deux maisons adossées l’une à l’autre : c’est l’emplacement de l’ancien moulin à eau de Chevagny, alimenté par le ruisseau à partir d’une retenue d’eau créée devant le moulin. On pourra s’étonner qu’un modeste ruisseau puisse faire tourner la roue d’un moulin, mais c’est qu’à cet emplacement de son cours il y a une double déclivité, Nord-Sud et Ouest-Est, qui donnait plus de force à l’eau.
Notre recherche a porté sur l’histoire de ce site et sur la famille Journet qui lui a donné son nom. Recherche longue et difficile car il existe peu de documents, et certains ont été perdus. Nous avons d’abord pu vérifier sur le cadastre de 1831 que l’eau coulait bien sous la maison du moulin Journet. Si on se promène le long de la Petite Grosne entre Prissé et Loché, on peut encore voir l’arche présente sous les moulins qui parsèment son cours : Moulin de Narbonne, de Verneuil, de Balme. Passant sous l’arche, l’eau tombait sur une roue faisant tourner la meule du moulin. Le fonctionnement était sans doute interrompu en période de basses eaux. Mais les meuniers étaient aussi cultivateurs et vignerons : il y avait une vigne en face du Moulin Journet.
Le « moulin de Chevani » (sic) figure sur la Carte de Cassini, établie entre 1756 et 1789. Mais quelle n’a pas été notre surprise de découvrir, dans un article de l’archéologue Gilles Rollier, que ce moulin avait été construit au Xème ou au XIème siècle, soit il y a près de mille ans ! Donc un site très ancien, même s’il a été remanié de nombreuses fois au cours des siècles.
Quant à la famille Journet, ce n’est pas sans mal que nous avons pu faire coïncider les données de l’état-civil ou autres pour la retrouver « en fonction » au Moulin. Nous avons pu vérifier sa présence sur les lieux de 1478 à 1836 (mais le dernier occupant est dit « cultivateur »). Il semble en effet que le moulin ait cessé de fonctionner vers la fin du dix-huitième siècle ou le début du dix-neuvième : après 1836, on ne trouve plus de Journet ou de meuniers à Chevagny, mais le moulin continue à être habité par la suite. Bien sûr le patronyme « Journet » existe ailleurs en Saône-et-Loire ou dans les départements voisins, et il existe plusieurs branches de cette famille.
Tombé partiellement en ruine avant la seconde guerre mondiale, le « moulin » divisé en deux maisons sera rebâti par la famille Esteves.
Joëlle Pojé-Crétien et Gino Schlanser